7. Préparer le territoire et les populations aux évacuations préventives

Face à un tsunami, les dramatiques expériences indonésiennes et japonaises ont montré que la seule parade efficace pour augmenter les chances de survie était l'évacuation préventive, massive et rapide, des populations littorales. Ces comportements, spontanés ou organisés, ont par exemple permis de sauver 95 % des habitants du littoral japonais lors du grand tsunami de la côte du Tōhoku du 11 mars 2011. Lors du tsunami de Sumatra du 26 décembre 2004, nombreux sont également les habitants de l'île de Simeulue qui ont trouvé leur salut en rejoignant spontanément les hauteurs, gardant en mémoire un événement similaire qui s'était produit en 1907. Certains aménagements lourds de défense côtière, constitués de digues et de brises lames, peuvent augmenter le temps de mise en sécurité en ralentissant le phénomène lors de sa pénétration dans les terres. C'est la double stratégie développée par le Japon depuis les années 50 et relancée à grand coup de bétonisation du littoral après la catastrophe de 2011.

L'objectif des plans d'évacuation est de sécuriser en un minimum de temps les populations littorales en les guidant vers une altitude supérieure à celle des effets attendus d'un tsunami. On privilégie une évacuation pédestre et horizontale, selon les itinéraires les plus rapides, vers des sites extérieurs (topographiques) et temporaires (quelques heures) de mise en sécurité. Ces plans sont établis à partir de relevés de terrain et de traitements cartographiques sous SIG, et ils répondent à une charte graphique particulière qui a été harmonisée au niveau national. Les itinéraires sont en général calculés au moyen d'algorithmes de recherche des chemins les plus rapides reposant sur la théorie des graphes. Les plans sont ensuite validés par les autorités locales, mis en ligne, et servent de support au balisage des itinéraires d'évacuation en respectant également une charte normalisée établie par l'UNESCO. On y retrouvera le jaune pour signaler la zone de danger et le vert pour indiquer les zones refuges (figures 4 et 5).

La finalité est de développer une acculturation au risque et d'encourager les autorités locales à organiser régulièrement des exercices d'évacuation tout en intégrant ces dispositifs dans les Plans Communaux de Sauvegarde (PCS) établis à l'échelle communale. Il est en effet bon de rappeler qu'un apprenant intègre seulement 10 % de ce qu'il lit et 80 % de ce qu'il expérimente par lui-même ! Les premiers plans officiels français, développés par des géographes de Montpellier, ont vu le jour en 2017 aux Antilles dans le cadre du projet EXPLOIT, et l'approche est en voie de dissémination à Mayotte et sur le littoral méditerranéen, notamment à Cannes et Bastia.

À terme, les territoires s'étant fortement engagés dans la prévention, avec des moyens d'alerte dédiés, des programmes de sensibilisation, des plans d'évacuation, des balisages d'itinéraires et la conduite régulière d'exercices d'évacuation, pourront obtenir une reconnaissance internationale « Tsunami Ready » qui viendra récompenser leurs efforts en la matière. La ville de Cannes s'est engagée en 2020 dans cette démarche louable, consciente que l'affichage du risque et des moyens de s'en protéger est aussi une marque de responsabilité à l'égard des citoyens et de leur sécurité. La cité balnéaire de demain sera aussi celle qui prendra en compte les risques et qui n'aura pas peur de communiquer sur le sujet tout en garantissant des solutions pour des touristes qui aspirent au repos, et pour autant conscients que les tsunamis restent du domaine du possible, même sur le littoral français. Et comme l'annonce désormais plusieurs hôtels d'Asie, « Enjoy your holiday - you are in good hands - life is a beach with 'Tsunami Ready'! ».

Plan du port de commerce de Bastia, en jaune tout les quais du ports sont à évacuer. En vers les zones refuge l'arrière de la ville, sont tracés les itinéraires fléchés d'accès d'une zone à l'autre.
Figure 4. Proposition de plan d'évacuation tsunami pour le centre de Bastia.Informations[1]
Panneau vert "Évacuation TSUNAMI" avec un personnage qui court une vague stylisée derrière lui et une grosse flèche indiquant la direction à suivre. Une autre version reprend le visuel mais indique "Gare SNCF" comme indicateur supplémentaire.
Figure 5. Types de balisages indiquant les routes d'évacuation à suivre en cas d'alerte tsunami (Cannes, expérimentations en cours).Informations[2]