2.2 La technologisation des espaces de pratique : le cas du surf

Si les supports et engins de pratiques nautiques sont en constante évolution depuis plusieurs décennies, les récentes bifurcations technologiques attestent d'un changement de paradigme.

Ce sont en effet dorénavant les espaces de pratiques qui sont aussi pensés et inventés aux fins de développement des activités mais dont les intérêts économiques sont toutefois largement sous-jacents. Depuis une dizaine d'années les piscines à vagues ou « surfpark » occupent une place médiatique croissante, notamment à mesure que les opposants à ces projets structurants pour les territoires se font entendre et visibilise les dangers qui, selon eux, reposent sur des dimensions écologiques, économiques et sociétales.

Si les projets de vagues artificielles, relativement nombreux à la fin des années 2010 en France sont peu à peu abandonnés eu égard à des conjonctures singulières (effet de la crise économico-sanitaire) ou structurelle (conscientisation écologique), il n'en demeure pas moins que les réflexions croisées entre promoteurs privés et collectivités locales (Sevran en région parisienne, près de Nantes, dans le département des Landes, à Saint-Jean-de-Luz, etc.) sont réels.

Les consommations de ressource en eau, les espaces à aménager et les besoins en électricité constituent des paramètres relativement sensibles pour les promoteurs comme pour les opposants. Toutefois, la surpopulation toujours plus dense de sites naturels de pratique comme les spots de surf (en Bretagne, Vendée et Nouvelle-Aquitaine principalement) d'une part puis la présence du surf aux Jeux Olympiques de Tokyo (2021) puis de Paris en 2024 (à Tahiti) d'autre part, participent de l'argumentaire selon lequel des espaces aménagés et artificialisés de pratique deviennent peu à peu nécessaire.

Les controverses politiques, économiques et environnementales sont, on l'a dit, étroitement liés à ces nouveaux espaces mais il est possible de supposer que les vagues artificielles deviennent un standard à part entière des pratiques nautiques dans un futur proche.

Remarque

Des analyses portant sur les transformations récentes de l'univers du surf du point de vue des technologies récentes notamment peuvent être identifiées (voir Guibert C. Les mondes du surf. Transformations historiques, trajectoires sociales, bifurcations technologiques. Bordeaux : MSHA, 2020) : Jeoffrey Dehez, dans un texte intitulé « Les nouvelles ressources de l'économie du surf » interroge les effets économiques des équipements innovants et structurants que sont les « piscines à vagues ». André Suchet et Adrien Malherbe appréhendent également ces bifurcations technologiques au sein de l'article « Les dispositifs de production de vagues artificielles pour le surf dans le monde. Actualité technique et aménagement des sites ».

L'artificialisation des vagues dédiées à la pratique exclusive du surf alimente bien l'idée selon laquelle, dans ces deux contributions, les enjeux sont tout autant économiques, sociaux, culturel que géographiques.

Ces nouveaux équipements (Surfpark) qui ne sont pas connus du droit soulève un ensemble de questions juridiques.

La première concerne la faisabilité du projet. De tels projets qui suppose le respect des plans locaux d'urbanisme (PLU) sont également assujettis au respect du droit de l'environnement.

En arrière-plan, la question environnementale émerge et porte avec elle des enjeux politiques majeurs. D'un côté la question environnementale, notamment le fait de déclassifier des terres agraires en terrain constructible et la question du développement économique et des emplois.

La seconde concerne le statut de cet équipement. Il s'agit d'un plan d'eau artificiel sur lequel sont pratiqués des activités physiques et sportives.

Le droit, en particulier le code du sport et de la santé publique, ne connaît pas ces constructions. Il ne s'agit pas de piscines.

Pour autant, il s'agit de lieux d'une pratique maritime (le surf) pratiqué, non pas en mer mais sur terre. Cet équipement répond à la définition d'un établissement d'activités physiques et sportives.

Définition

" Est appelé Établissement d'Activités Physiques et Sportives un équipement qui peut-être fixe (stade, gymnase, piscine...) ou mobile (bateaux, centres équestres, écoles de parapente...) et qui permet la pratique d'une activité physique ou sportive sur une certaine durée. Cette durée peut être de quelques mois (comme c'est le cas de beaucoup d'établissements saisonniers), ou régulière mais discontinue comme c'est le cas des établissements de ball-trap dominicaux ou d'établissements offrant des “sauts de ponts avec élastique "

(Instruction n°94-049JS).