2.3 Quel apport des nouvelles technologies ?

Avec l'apparition de nouvelles pratiques récréatives et touristiques et l'essor des nouvelles technologies, plusieurs des dispositifs traditionnels d'évaluation des fréquentations sont aujourd'hui moins pertinents. Ainsi, l'hébergement en hôtel a beaucoup reculé et ne représente plus aussi bien qu'avant le niveau de présence de touristes sur un territoire, alors que les séjours chez l'habitant (via AirBnb notamment) se sont multipliés sans être bien mesurés. De même, les opérateurs touristiques se sont diversifiés et accrus : beaucoup de microentreprises accueillent des visiteurs, sans que leur niveau d'activité soit connu. Enfin, les possibilités de s'informer sur l'offre récréative et touristique passent beaucoup par les réseaux sociaux. Les passages dans les offices de tourisme ne sont plus aussi pertinents que par le passé.

Les nouvelles technologies apparaissent dès lors comme une alternative prometteuse. Depuis assez longtemps, les nombres de clics ou de téléchargements sont comptabilisés par les sites internet permettant aux organismes propriétaires de disposer de chiffres manifestant un intérêt pour une destination touristique, un service ou un événement festif ou culturel. Plus récemment, l'essor spectaculaire de la téléphonie mobile et plus particulièrement des « smart phones » a ouvert la possibilité de comptabiliser des connexions et des abonnés sur des services, de collecter des avis sur des réseaux sociaux (dont les « like » de FaceBook, par exemple), de diffuser des mini-enquêtes par questionnaires, etc. L'équipement de bornes wifi dans l'espace public (des jardins publics, des plages, des places piétonnes, des musées, etc.) autorise aussi la collecte de données de connexion et indirectement d'évaluer la fréquentation d'un lieu (Figure 7).

Affiche d'information électronique sur un mur d'une rue à proximité de la plage des Catalans à Marseille.L'équipement intègre une borne wifi dont il est possible de récolter le nombre de connexions. La ville s'affiche comme « connectée ».
Figure 7. Un panneau d'information électronique du mobilier urbain près de la plage des Catalans à MarseilleInformations[1]

L'équipement intègre une borne wifi dont il est possible de récolter le nombre de connexions. La ville s'affiche comme « connectée ».

Convaincus des apports déterminants des nouvelles technologies de la communication, de nombreux opérateurs informatiques en lien avec des collectivités territoriales et/ou des opérateurs de téléphonie mobile sont aujourd'hui lancés dans la conception de systèmes d'information en temps réel. Participant du concept de « smart city », ces développements visent à produire des données de présence de personnes sur des lieux à partir des connexions des téléphones mobiles aux réseaux de télécommunication (antennes relais, bornes wifi, etc.). D'autres développements se fondent sur les données de vidéosurveillance de l'espace public, à partir desquelles des algorithmes de traitement d'images vidéo permettent de dénombrer les personnes sur les lieux. La combinaison de ces différentes sources (bornes wifi, antennes-relais de téléphonie mobile, vidéosurveillance) cumulées à des données contextuelles (date, heure, météorologie) voire les données déclaratives des usagers permettraient in fine de cerner finement la population se déployant dans l'espace public et de la dénombrer. Mais les modèles intégrant toute cette information restent à inventer.

Les développements qu'autoriserait le Big Data n'ont en effet pas encore débouché sur des applications convaincantes et opérationnalisées. Si les données numériques sont partout et en très grande quantité sur tous les faits et gestes des individus, leur intégration dans un dispositif unique capable de renseigner sur les fréquentations d'un lieu comme une station toute entière reste un défi immense, tant sur le plan conceptuel que sur le plan technologique. En outre, ces données ne disent rien des profils des usagers ni de leurs motivations à visiter le lieu où ils se trouvent. Les données quantitatives dérivées des connexions aux réseaux de communication ou de la vidéosurveillance de l'espace public ne peuvent pas remplacer la démarche d'enquête. Enfin, de telles données sont sensibles. Elles posent la question de la protection des individus et des libertés individuelles. Parce que le Big Data ne doit pas permettre l'émergence de Big Brother, nombre d'associations de citoyens restent vigilantes.