2.5.2 Bioremédiation in situ : le bioventing
Remarque
Ne pas confondre le Venting (technique basée sur l'extraction par volatilisation des polluants du sol (pas de dégradation) par injection d'air à débit élevé d'où nécessité d'un post-traitement et le bioventing.
Dans le cas du bioventing, il s'agit d'accélérer la biodégradation des polluants par les microorganismes indigènes, en induisant une circulation d'air à faible débit dans la zone polluée (insaturée) afin de limiter l'élimination des polluants par volatilisation (par exemple, pas d'émissions observées d'hydrocarbures supérieures à 2,5 mg/jour /m²). C'est une différence avec le venting qui emploie des débits très forts d'où des coûts plus élevés (coût de l'aération + coût de traitement des polluants extraits du sol). On utilise cette technique pour des sites fortement pollués par des hydrocarbures rapidement biodégradables.
Deux techniques existent : 1/ par injection d'air à partir de puits situés dans la zone polluée, là où les besoins en O2 sont élevés pour favoriser la dégradation microbienne des polluants, et par extraction des polluants résiduels à partir de puits situés à la périphérie de la zone, là où les teneurs en polluants sont faibles (Figure 017). La disposition des puits d'extraction et d'injection en venting est inversée. Les zones proches du point d'injection auront tendance à se colmater à cause de la forte croissance des microorganismes. Dans certains cas, on injecte un substrat en même temps que l'air, source de C et d'énergie, dans le cas de co-métabolisme (ex : dégradation du trichloréthylène nécessitant d'apporter du méthane), 2/ par dépression en utilisant uniquement les puits d'extraction.
Les puits d'injection d'air font 30 cm de diamètre maxi où sont introduits des tuyaux PVC de 10 cm de diamètre crépinés sur toute la hauteur de la zone polluée dans le but de distribuer l'oxygène.

Variantes du traitement par bioventing : 1/ bioventing avec réinjection des effluents gazeux dans les sols : on réinjecte les effluents gazeux dans des portions de sol non contaminé pour les dégrader, 2/ biosparging qui consiste à injecter de l'air dans la zone saturée pour, d'une part, stimuler la biodégradation des polluants en milieu liquide et d'autre part vaporiser les contaminants dissous dans la nappe, qui seront ensuite biodégradés dans la zone insaturée (plus riche en microorganismes). La combinaison des deux techniques est adaptée au traitement de molécules dégradables en aérobiose (composés mono aromatiques contenus dans les essences et les solvants chlorés aliphatiques).
Pour dimensionner l'installation (emplacement, nombre et géométrie des puits d'injection et d'extraction), il faut tenir compte des points suivants :
Pour dimensionner l'installation (emplacement, nombre et géométrie des puits d'injection et d'extraction), il faut tenir compte des points suivants :
1/ Caractéristiques de la zone à traiter (texture/structure, analyses chimiques, pH...) :
Texture : on peut utiliser le bioventing pour des sols sableux et limoneux mais pas pour des sols trop argileux ;
Taux d'humidité : ne doit pas être trop élevé (optimum = 10%) pour ne pas gêner le transfert d'O2, ni trop faible, quoique des activités microbiennes aient été observées dans des zone semi-arides avec 3 à 5% d'humidité ;
Teneurs en azote et en phosphore : > 20 mg/kg de sol pour N et 3 mg/kg pour P ;
Température : bien que ce soit un facteur important, des activités biologiques s'observent à 0°C.
2/ Perméabilité du sol aux gaz
La connaissance de K (perméabilité en Darcy) donne une idée de la facilité de dépollution du sol. Les sols avec une perméabilité à l'air élevée seront les plus facilement dépollués (cas des sols sableux).

Avec :
K : (perméabilité en Darcy ou en m2 (avec 1 darcy = 0,97 10-12 m2)
Q : débit de gaz (apporté dans le puits d'injection en m3/s)
µ : viscosité de l'air (0,078 centipoise ou Pa.s)
H : épaisseur du sol traité ou hauteur crépinée (en m)
A = dP/dt (A, déterminé lorsque valeurs stables de pression ; avec P, pression en Pa)
A différentes distances autour du puits d'injection de l'air, et à différentes profondeurs, des sondes capables de mesurer de faibles dépressions sont mises en places pour mesurer A. Q est déterminé en sortie de ventilateur ce qui permet de déterminer K.
La pression d'injection d'air ne doit pas dépasser 0,4 bar afin d'éviter la création de chemins préférentiels qui perturberaient la distribution uniforme de l'O2 - les performances de dépollution diminuent lorsque le sol est hétérogène et contient des zones de fracture. La distribution de l'O2 est généralement uniforme lorsque la perméabilité >0,1 Darcy.
L'aération peut entraîner un assèchement du sol. Il faut donc contrôler l'humidité du sol (>5%).
3/ Rayon d'influence de l'aération à partir du puits d'injection
Il s'agit de la distance maxi à partir du puits d'aspiration ou d'injection d'air pour laquelle l'apport d'O2 est encore suffisant pour le métabolisme microbien. En pratique, il s'agit de la distance maximale (pour un débit constant) pour laquelle la dépression mesurée (après stabilisation) dans des puits de contrôle est supérieure à une colonne d'eau de 2,5 mm (3 10-3 bar). La valeur du rayon, variable selon les propriétés du sol, permet d'optimiser le nombre et l'emplacement des puits d'injection. Pour étendre le rayon d'influence de l'aération autour du puits, notamment pour des zones polluées de faible profondeur (1 à 3 m), il est recommandé de rendre imperméable la surface du sol (mise en place d'une bâche).
4/ Vitesse de consommation d'oxygène
Elle sert d'indicateur de l'activité microbiologique. Elle est calculée de manière théorique (cf. exercice sur le volume d'air à apporter pour dégrader des HAP) ou à partir d'un test de respiration in situ. On peut alors calculer le débit minimum d'aération pour maintenir une atmosphère aérobie avec une teneur minimum en O2 de 3-4% (en volume).
5/ vitesse de dégradation
A partir de la vitesse de la consommation d'oxygène, on en déduit celle du polluant.
CH = C0Vdτ
Avec :
- CH, exprimé en mg polluant/kg sol/jour ;
- C0 = O2 consommé /jour (en mg/l/jour) ;
- V = volume d'air (litres)/kg sol ;
- d = densité de l'oxygène ;
- τ (cas d'hydrocarbures) = masse d'hydrocarbures minéralisés/masse d'oxygène consommé = 0,3.
En moyenne, CH = 0,89 C0 avec un sol de porosité de 30% et une densité de 1,45.
De façon générale, il est admis qu'une opération de bioventing n'est pas à recommander lorsque les valeurs de CH ≤ 1,5 mg/kg sol/jour.
Un inconvénient majeur est la durée du traitement (plusieurs années parfois) alors qu'économiquement, le bioventing est moins coûteux que le venting. Tel est l'exemple du traitement des hydrocarbures, sans traitement des effluents gazeux pour
Un sol argileux contaminé par des essences vieillies : 17 mg/kg sol/jour avec bioventing et 3900 mg/kg sol/jour avec venting,
Sol sableux avec peu d'argiles : 14 mg/kg sol/jour avec bioventing et 85500 mg/kg sol/jour avec venting.