2.3.2 Exemples de Micropolluants Inorganiques

2.3.2.1 Le cas de l’élevage
Les lisiers et fumiers produits par les élevages sont très riches en azote et phosphore, deux éléments chimiques nécessaires à la croissance végétale, et ils fournissent en plus de la matière organique qui améliore la structure du sol. Avant le milieu du XXème siècle, les agriculteurs les utilisaient en tant qu’engrais, sans qu’il n’y ait de conséquences importantes pour l’environnement.

Mais après la Seconde Guerre mondiale, le phénomène d’automatisation et par conséquent l’intensification agricole a changé la donne. L’importante augmentation de l’activité d’élevage, notamment l’élevage hors-sol, a augmenté les quantités de déjections animales à épandre de façon importante. D’autre part, les agriculteurs ont commencé à ajouter au sol - en plus des lisiers et fumiers - des engrais chimiques qui fournissent une composition chimique plus stable et qui sont plus rapidement assimilables par les plantes. Ces deux évolutions ont eu pour conséquence de mettre à disposition des végétaux un trop plein de nutriments. Le surplus est diffusé dans l’environnement et notamment par le phénomène de lessivage par les eaux de pluie avant de rejoindre le milieu aquatique. Ce problème est particulièrement important en Bretagne puisque c’est dans cette région que sont concentrés les élevages français. (Voir l'Annexe : Les voies de transfert des nitrates et des phosphates)
2.3.2.2 Le cas de l’industrie
2.3.2.2.1 La phosphatation des surfaces métalliques
Les voitures, les réfrigérateurs, les machines à lessiver et bien d’autres équipements peints ou émaillés comportent tous un revêtement (ou coating) phosphaté entre la surface métallique et la peinture. L’acide phosphorique purifié et les phosphates participent au processus de phosphatation des surfaces métalliques. Cette opération permet de réduire les risques de corrosion des métaux, de les isoler électriquement et de favoriser l’adhérence de la peinture à la surface traitée.

Il existe deux types de phosphatation, la phosphatation au fer amorphe et celle cristalline au zinc.

 -  Phosphatation cristalline au zinc :
Elle protège de la corrosion, et il existe plusieurs procédés tel que : la Waltérisation, la Granodisation, les procédés Fosbond (Penwalt), Phosphatex (Sophos), pour ne citer que les principaux.

 -  Phosphatation au fer amorphe :
Elle est utilisée pour accrocher des revêtements organiques. Les couches appliquaient sont très minces de l’ordre de 0.3 à 1g/m2, elles permettent grâce à leur structure poreuse une parfaite adhérence des peintures et d’excellentes possibilités de formage dans le cas de tôles prépeintes (pliage, agrafage, etc.). Elles n’ont en revanche que des propriétés d’anticorrosion médiocres.
L’apparition des ions OH- explique la neutralisation progressive de la solution par formation de HPO42- (par exemple, phosphate disodique HNa2PO4). Il faut donc stabiliser le pH à l’aide d’un correcteur à base d’acide orthophosphorique ou d’acides organiques de manière à maintenir l’efficacité du bain.

2.3.2.2.2 Céramique, émaux et réfractaires
Lors de la préparation des solutions utilisées dans l’industrie de la céramique ou des émaux, il peut être nécessaire d’ajouter des additifs afin d’obtenir une pâte fluide ou une solution bien dispersée. Des phosphates tels le STPP (triphosphate de sodium) ou le SHMP (hexamétaphosphate de sodium) sont alors utilisés comme agents dispersants.

STTP : Triphosphate de sodium

SHMP : Hexamétaphosphate de sodium.

2.3.2.2.3 Papier
Parmi les nombreux produits utilisés dans les industries de pâte à papier, il en est peu qui possèdent des utilisations aussi diverses que les phosphates. Leurs propriétés dispersantes les rendent extrêmement utiles afin de limiter l’agglomération des charges minérales, les pigments, résines (et autres solides pulvérisant) lors d’une mise en suspension. D’autres propriétés sont mises en jeu dans l’élaboration des pâtes, aussi bien chimiques que mécaniques et désencrées. Pour les pâtes vierges issues d’essences de bois contenant beaucoup de résine, on peut constater dans certains cas l’apparition d’une «gomme» autour de fibres pouvant mener à la formation de trous sur la feuille de papier : les points de pois (pitch). L’ajout de phosphates bien choisis permet d’inhiber ce phénomène.

2.3.2.2.4 Les peintures
Le tributylétain (TBT) est un composé toxique que l'on trouvait autrefois dans la plupart des peintures antisalissures (qui servent à prévenir l'incrustation des balanes et d'autres organismes marins sur la coque des navires, les parcs à poissons et d'autres surfaces exposées aux eaux marines). Il a été commercialisé dans les années 1960 pour remplacer les renforçateurs organomercuriques, arsénicaux et plombiques dans les peintures à base de cuivre. Il devint évident, à la fin des années 1970, que non seulement le TBT subissait une lixiviation  à partir des surfaces peintes, mais qu'il avait des effets néfastes sur des formes de vie marine autres que celles visées. Pendant les années 1980, des concentrations dangereuses de TBT ont été détectées dans de nombreux estuaires et secteurs côtiers de par le monde. Dans certains cas, elles atteignaient des milliers de nanogrammes par litre dans l'eau.

Des effets délétères sont observés chez de nombreuses espèces d'organismes marins. Deux de ces effets, l'effet « imposex » et l'épaississement de la coquille, sont des indicateurs de la contamination de la faune et de la flore marines. L'effet « imposex » entraîne une diminution des populations de gastéropodes à cause de la réduction du nombre de femelles fertiles. Du fait des relations écologiques, d'autres espèces sont également touchées. Ainsi, les gastéropodes connaissent une mue périodique qui a pour but d'assurer leur croissance par la constitution d'une nouvelle peau. Après la mue, ils laissent derrière eux une coquille vide, que les bernard-l'hermite colonisent ensuite. En conséquence, les effectifs de cette espèce diminuent en même temps que ceux des gastéropodes. (Amiard,)
Complément
 
Définition

La lixiviation correspond à la percolation lente de l'eau à travers le sol, accompagnée de la dissolution des matières solides qui y sont contenues. Le liquide résultant est le lixiviat. Par exemple, l'eau peut ainsi se charger en substances toxiques lors de la traversée des sols ayant servi de décharges, ou des sols contenant des nitrates en quantité. La lixiviation en tas ou en réacteur mobile est aujourd’hui couramment utilisée pour décontaminer des terres ou des déchets pollués par des éléments organiques ou minéraux.

Référence bibliographique

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